Tu es nouveau ?

TomboyTomboy. Un titre anglais pour un film bien français. Je ne l’avais pas vu quand il est sorti il y a quatre ans. Un si beau film que je viens donc de découvrir, hier soir, sur une chaîne que je ne connaissais même pas !
Peut-être l’avez-vous vu et peut-être en gardez-vous un souvenir émerveillé. Tout y est juste, délicat, si bien vu et si profond, avec une finesse qui rend heureux. La cinéaste nous remmène sur les traces de notre enfance, on renoue avec des sensations et des sentiments qu’on n’oublie jamais. On a dix ans à nouveau, comme Laure, garçon manqué, mais surtout inventé pour pouvoir faire ce que font les garçons. On a six ans, comme Jeanne, sa petite soeur aux cheveux de princesse et prête comme les enfants à s’embarquer dans les histoires que leur raconte leur grand frère ou leur grande soeur. On respire à nouveau cette liberté des enfants qui passent leurs journées tous ensemble, sans les parents pour les surveiller sans cesse. On est aux côtés de Laure / Michaël, dans tous ses défis à elle-même et aux autres, on sourit, on rit, on s’inquiète, on veut savoir comment les choses vont se passer quand on brouille les repères entre ce que cela signifie être une fille ou un garçon. Tout est fluide, intelligent et subtil.

La bande annonce est ici.

Transcription :
– Tu es nouveau ? (1)
– Ouais, on est arrivés hier.
– Tu veux pas me dire comment tu t’appelles ?
– Michaël, je m’appelle Michaël.
– Hé ! C’est Michaël, le nouveau du bâtiment C.
– Laure, sors du bain.
– Coupe pas trop (2) pour pas que (3) maman, elle voit. Est-ce que tu coupes droit ?
– Oui, je suis pas débile ! (4)
– Tu as dit à tout le monde que tu étais un garçon ? Pourquoi tu as fait ça ?

Quelques détails :
1. Tu es nouveau ? : Dans d’autres langues, comme l’anglais, la nuance masculin-féminin de l’adjectif est perdue. En français, d’emblée, avec ce « nouveau », on sait de quel côté on est et c’est ce qui permet à Laure de s’inventer, au pied levé, cette identité de garçon à laquelle tous les enfants vont croire.
2. Coupe pas trop : forme orale de l’impératif négatif : Ne coupe pas trop. (Et non, il n’y a pas de « s » au bout de l’impératif des verbes du 1er groupe, contrairement à la faute très répandue maintenant!)
3. pour pas que : forme orale de « pour ne pas que… »
4. débile : idiot, bête.

7 réflexions sur “Tu es nouveau ?

  1. Rick Ellis dit :

    Bonjour Anne,,

    « Mieux vaut tard que jamais » comme on dit, et en voilà un bel exemple. Je suis ravi que tu aies vu « Tomboy ». Moi je l’ai vu il y a quelques ans, au ciné ici en Floride, quand le film faisait son apparition et petit « tour à l’étranger » suite à son début en France. En effet, je me souviens de diverses scènes du film et son effet, presque physique, sur moi. Le même effet que pas mal de films français avait eu sur moi avant « Tomboy », celui qui m’arrive de ces oeuvres de grand courage qui parlent de l’émotionnel, du personnel, qui présentent une sorte de « belle provocation », c’est-à-dire, « humaine » du meilleur sens. Et en regardant « Tomboy » j’étais bien conscient d’être devant une des plus courageuses et plus belles de ces oeuvres, enfin pour moi un des chef-d’oeuvres du ciné français.

    See you at the movies! (Un beau jour en France, j’espère.)

    Très bonne journée,
    Rick

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  2. salianne dit :

    Merci beaucoup, Anne
    Suite à votre recommendation, je viens de voir ce film ici en Angleterre et moi aussi je l’ai trouvé formidable.
    Est-ce que le mot ‘tomboy’ s’emploie souvent en français? Peut-être il a une certaine allure par rapport à ‘garçon manqué’? Je ne sais pas. De toute façon un très bon film.
    J’aime bien votre blog – bonne continuation
    Amicalement
    Salianne

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  3. Anne dit :

    Bonjour Salianne et merci pour ce gentil message. J’espère que d’autres auront envie aussi de voir ce film effectivement formidable s’ils ne le connaissent pas encore.
    Non, on n’emploie pas d’habitude le mot « tomboy » en français, contrairement à d’autres mots. Je ne suis pas sûre du tout que la plupart des gens le comprennent. Donc je ne sais pas bien pourquoi la réalisatrice a choisi ce titre pour son film. Peut-être justement pour que les futurs spectateurs n’aient pas d’a priori, c’est-à-dire que ne comprenant pas le mot anglais, ils sont davantage attirés, parce que c’est de l’anglais et que ça ne leur dit rien sur le sujet du film ! Elle l’a peut-être expliqué quelque part dans une interview. Je me suis posé la question en tout cas !
    Amitiés
    Anne

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  4. Anne dit :

    Bonjour Rick,
    Merci à toi aussi de donner à d’autres lecteurs de ce blog l’envie de voir ce beau film !
    En lisant des critiques américaines, il y a juste quelque chose qui m’a surprise car certains y ont vu un film en faveur des gens qui veulent changer de sexe. On peut peut-être imaginer ça à propos de Laure, mais il y a aussi tout simplement plein de filles qui ont envie, ou eu envie à un moment ou un autre d’être des garçons, pour la liberté que cela procure dans de nombreuses situations: en devenant Mickaël, elle peut jouer au foot (sport masculin par excellence sauf aux Etats-Unis), elle peut cracher par terre, elle peut enlever son T-shirt, etc… Autant de petits symboles. Elle n’est pas obligée d’être dans les rôles habituels donnés aux filles. elle peut se battre avec les garçons et être plus forte qu’eux. Et elle peut s’inventer une vie, jouer un autre rôle, comme on aime tous / comme on a tous aimé le faire dans l’enfance.
    Ce que j’aime aussi beaucoup dans ce film, c’est cette impression d’une enfance en liberté, où on court, on se dépense physiquement, on vit tous les instants avec une présence totale.
    A bientôt

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  5. Rick Ellis dit :

    Coucou Anne, j’ajoute ce petit mot juste pour te dire que ton commentaire sur les critiques américaines m’a fait sourire. Je ne les ai pas lus, moi, mais je peux bien imaginer ce que tu décris. C’est souvent comme ça « chez nous » (les américains), c’est-à-dire une belle histoire n’est pas toujours suffisante et, plutôt que de nous contenter de sa beauté, il faut la mettre au service de quelque chose d’ « utile » ou de « pratique », ce qui pourrait être une cause sociale ou pour la vendre, tout simplement. On n’est surtout pas très « fan » des films qui « ne se terminent pas » ou se teminent mal, tu sais. Tout ça se manifeste assez fort dans le ciné américain, et ça résume plus ou moins pourquoi je me « réfugie », avec beaucoup de reconnaissance, dans le ciné français.

    Bonne journée et à bientôt,
    Rick

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