Je marche, tu marches, il marche

Je partage avec vous une nouvelle richesse du web :
un podcast quotidien qui va nous faire traverser la France à pied, du nord-est au sud-ouest, en suivant un itinéraire baptisé la Diagonale du vide.

Voici le lien pour suivre ce périple et aussi écouter tous les épisodes antérieurs si le coeur vous en dit.
(Vous pouvez bien sûr écouter avec n’importe quel lecteur de podcasts, sur votre téléphone.)

Je vous explique de quoi il s’agit ici :

Transcription :


Alors, est-ce que vous aimez marcher ? Vous savez sans doute que de mon côté, oui, moi, j’aime marcher, parce que, en fait, je trouve il y a un petit côté magique de se dire que de toute façon, sur ses deux jambes, on peut toujours aller quelque part et qu’on a cette espèce de liberté, alors que nos voitures peuvent être en panne d’essence ou les trains, les transports peuvent être à l’arrêt, et je trouve que savoir qu’on peut se déplacer à pied, c’est très libérateur.

Je me souviens d’une fois à Marseille où il avait commencé à neiger dans la matinée, et comme il ne neige que très rarement à Marseille, c’était vraiment la panique chez mes éudiants, parce qu’ils pensaient qu’en fait, ils n’allaient pas pouvoir rentrer chez eux et ils étaient obsédés par l’idée que les bus, les métros allaient être arrêtés et que donc ça allait être très compliqué pour rentrer chez eux.

Alors je comprends pour ceux qui habitent loin, mais beaucoup habitent en fait assez près, ou en tout cas dans Marseille, et je leur ai dit : « Mais vous pourrez toujours rentrer chez vous à pied, ne vous inquiétez pas, ne paniquez pas. » Et alors là, ils m’avaient regardée comme une extra-terrestre. Bien sûr, c’était plus long, ce n’était pas facile, c’était… surtout si on est mal chaussé (1), mais c’était tout à fait faisable, parce que chez nous, c’est pas des quantités énormes de neige qui tombent. De toute façon, on n’est pas à la montagne à Marseille ! Et donc j’avais été surprise par leur réaction et le fait qu’ils n’envisagent pas le fait de se déplacer à pied comme un moyen vraiment très pratique. Et eux m’avaient regardée vraiment aussi… Ils avaient été très, très surpris.

Alors pour en revenir à cette histoire de marche, je voudrais aujourd’hui partager avec vous un podcast que j’écoute et qui pourrait bien vous plaire, ou en tout cas à certains d’entre vous. Il s’agit du podcast d’Hervé Pauchon qui est un ancien journaliste de France Inter que vous connaissez peut-être si vous me suivez depuis longtemps, ou pour une autre raison, parce que j’ai déjà transcrit des petits passages de ses émissions. Et pourquoi est-ce que j’avais fait ça ? Parce qu’il interviewait à ce moment-là des gens ordinaires, prdinaires dans le sens de pas des gens célèbres, donc des gens qu’il faisait parler de leur métier, de leurs passions, et il mettait en évidence leur singularité. Et il le faisait de façon très naturelle, il les faisait parler de façon très spontanée, et j’aimais beaucoup parce que c’était court, c’était vivant, c’était original. Tout ce que j’aime !

Et toujours est-il qu’à un moment donné, ses petites chroniques ont disparu de la grille des programmes. Mais à l’époque, je n’ai pas fait trop attention (2) au début. Puis un jour, je me suis dit : « Bon, bah voilà, l’émission est terminée, il a arrêté. » En fait, j’ai appris plus tard qu’il avait été viré, viré de F.I. Et j’emploie vraiment ce mot, et pas seulement « licencié », parce que en fait, il a été renvoyé, viré comme un malpropre (3), c’est-à-dire que les responsables de cette radio ont estimé que cette émission n’intéressait plus assez. Et ils l’ont supprimée. Il a appris ça assez brutalement et il l’a apparemment mal vécu (4) pendant un bon moment.

Et puis, l’an dernier, j’ai découvert par hasard qu’on pourrait à nouveau l’écouter parce qu’il partait sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle. C’était une aventure personnelle, dont il avait sûrement besoin parce qu’il devait tourner en rond (5), au chômage. Donc une aventure personnelle, mais qu’il a décidé de partager en faisant ce qu’il savait si bien faire, c’est-à-dire aller à la rencontre des gens qu’il allait immanquablement (6) croiser sur sa route, des marcheurs comme lui mais aussi des habitants des lieux qu’il allait traverser. Et ça a donné un podcast par jour pendant tout son périple (7).

Eh bien, il remet ça (8) ! Mais entre temps, il a réalisé… il a continué à réaliser à nouveau des podcasts hebdomadaires, sur le même principe, un petit peu plus longs, mais en rentrant chez lui tous les soirs. Mais apparemment, ça le démangeait (9) de repartir, avec son sac à dos. Et donc depuis le 20 mars, il est parti pour faire 1500… je sais plus si c’est 1500 ou 1800 km, à travers la France, sur la Diagonale du vide, du nord-est de la France au sud-ouest. Et bien sûr, il est parti avec son fidèle micro et de quoi faire ses montages quotidiens, car oui, c’est à nouveau un podcast par jour, publié tous les matins, de bonne heure vers 6 heures, quelque chose comme ça. C’est reparti (10)!

Alors pourquoi est-ce que j’ai pensé à vous ?
Parce que ça permet premièrement d’entendre du « vrai » français ! Et c’est tous les jours, donc il y a vraiment de quoi se mettre sous la dent (11), oui, travailler son français !
Ensuite c’est un podcast, donc bien sûr on peut l’écouter quand on veut.
Ensuite vous allez entendre des gens de toute la France, des gens comme vous et moi, des gens bien vivants, uniques.
Et aussi des gens avec des accents très différents, qu’on entend en France selon les régions, puisqu’il part du nord et il va vers le sud et donc il traverse des endroits complètement différents en terme d’accents.

Extrait de l’épisode 2 :
(…) Il faut que j’y aille parce que j’ai mon petit-fils à aller rechercher à l’école.
Alors bonne journée !
Merci, vous aussi. Vous êtes de où ?
Moi, je suis de Paris.
Ah oui, bah alors, vous avez pas de chance, hein ! Qu’est-ce que vous faites à Paris ? C’est le dernier endroit que j’irais habiter, moi ! Ah là, là, gardez-le, Paris ! Mettez un coup de peinture à la Tour Eiffel de temps en temps, et c’est tout. Ah non, Paris, c’est atroce, c’est la ville. Qu’est-ce que vous faites en ville ?
C’est pour ça que je marche !
Qu’est-ce que vous faites en ville, mon dieu de mon dieu ! C’est bien d’y aller , allez (12), occasionnellement, mais oh là, là, faut pas vivre là-dedans ! Vous loupez tout (13) ! C’est pour ça que les Parisiens, le moindre vacances (14), hop ils se sauvent, hein! Non, non, bah nous, on est déjà en vacances.
Parce que vous êtes à la retraite, vous ?
Pas encore ! Avec les conneries ( 15) qu’ils nous font, là, qu’ils nous remettent trois ans dans la gueule (16), là !
Vous faites quoi dans la vie ?
Bah, je suis… Il y a l’entreprise là pour une fois pas loin de chez moi.
Ah oui, une grosse entreprise. Ils fabriquent quoi ?
Câblerie, câbles informatiques. Mais quand on est en trois-huit (17) depuis 40 ans, hein, ça commence à peser (18), parce qu’on ne fait pas que ça ! On a nos jardins, on a nos entretiens (19), nous on n’appelle pas un peintre quand on a besoin de peindre, on change nos roues nous-mêmes, hein, voilà. La vie ouvrier. Bon bah, c’est tout, j’y vais parce qu’il faut que j’aille chercher mon petit-fils, là.
Allez, bonne route.
Merci. Allez, vous aussi !

Donc c’est super parce que, comme ça, vous allez entendre un français qui n’est pas le français qu’on entend juste dans les medias – un français assez standard – et vous allez entendre des accents variés.

Et puis, encore une autre raison qui fait que je trouve que c’est super, c’est parce que, à chaque fois, H. P. lit aussi les mails qu’il reçoit, parce qu’il y a plein de gens qui aiment son travail, qui aimaient son travail et qui l’aiment toujours et qui avaient été très déçus qu’il soit licencié par F.I. . Et donc ils lui écrivent. Et franchement, ces gens-là écrivent mais vraiment très bien. C’est touchant, c’est personnel, c’est très bien formulé, enfin vraiment, je trouve que c’est un régal (20) d’écouter H.P., avec son accent parisien, nous lire ces témoignages qu’il reçoit de la part de ses fidèles auditeurs.

Et aussi parce qu’ils répondent à la question qu’H.P. a pris l’habitude de poser à ceux qu’il interviewe, c’est-à-dire : Qu’est-ce qui vous rend heureux ? Et alors là, c’est quand même en général des super témoignages qui font réfléchir, qui font voyager, qui remontent le moral (21), etc.
Camille me dit : « Quel bonheur de te retrouver ! C’est bien simple, ton podcast fait partie des choses qui m’aident à combattre mon anxiété. Ta capacité à capter l’émotion de celles et ceux que tu rencontres m’apaise et les chemins de vie, même les plus anodins (22), me fascinent. Très bientôt, je pars sur le GR 800 (23) pour relier Amiens et Saint Valéry sur Somme. C’est la première fois, à bientôt 36 ans, que je me lance sur un GR toute seule. Ce qui me rend heureuse : mon fils, mon compagnon, marcher et la bonne bière belge ! Merci de nous enchanter au quotidien. » Eh bien, merci Camille et je boirais bien une petite bière fraîche, là, même si ça ne serait pas raisonnable parce que ça va me couper les jambes (24). J’ai encore une dizaine de kilomètres à faire. Aujourd’hui, c’est une étape raisonnable, je crois qu’il y a 23 kilomètres à peu près.

Et tout ça, c’est très vivant parce que H.P. décrit ce qu’il voit, il enregistre des sons et son podcast devient cet assemblage de témoignages, de lecture de mails qu’il a reçus, de sons qu’il enregistre sur son chemin et aussi de descriptions de ce qu’il voit et ça devient une espèce de carte postale sonore, et franchement, c’est bien fait.

Alors, l’inconvénient, dans mon optique (25) sur ce site – mon optique, c’est de vous aider à tout comprendre, pour ceux qui apprennent le français – le problème donc, l’inconvénient, c’est que ce n’est pas transcrit évidemment; ça dure à peu près une demi-heure, il n’y a rien de transcrit. Mais je vous propose, si vous écoutez, de me dire ce que vous n’avez pas compris ou ce que vous avez mal entendu. Et à ce moment-là, je partirai de vos demandes pour expliquer, pour commenter ce matériau si riche qu’il partage avec nous. Et puis je pense que de toute façon, je vais trouver aussi là-dedans des expressions, des façons de parler dont je vous reparlerai de toute façon sans que vous ayez à me demander quoi que ce soit.

Quelques explications :

  1. être mal chaussé : ne pas avoir de chaussures adaptées à l’activité qu’on veut faire
  2. je n’ai pas fait trop attention : je n’ai pas vraiment remarqué
  3. se faire virer comme un malpropre : cette expression signifie qu’on s’est fait renvoyer, qu’on a été rejeté sans ménagement, de façon brutale. (familier)
  4. il l’a mal vécu : il a eu du mal à accepter cette situation, ça l’a perturbé
  5. tourner en rond : s’ennuyer, faire toujours la même chose et ne pas avancer dans sa vie
  6. immanquablement : nécessairement
  7. un périple : un voyage, plutôt long en général
  8. remettre ça : faire de nouveau quelque chose, recommencer (familier)
  9. ça le démangeait (de repartir ) : il avait très envie de repartir. (familier) Cette expression vient du sens littéral de démanger, qui signifie qu’on ressent une démangeaison (sur la peau) et donc le besoin de se gratter.
  10. c’est reparti : ça recommence
  11. il y a de quoi se mettre sous la dent : il y a beaucoup de choses à écouter, à lire, à voir, et donc ici, à utiliser pour améliorer son français oral.
  12. allez, occasionnellement : ce « allez » signifie qu’il reconnaît quand même qu’une petite visite à Paris de temps en temps, ça peut être bien. C’est comme s’il disait : bon, Paris, c’est nul, masi je vous accorde que de temps en temps…
  13. Vous loupez tout : vous passez à côté de toutes les bonnes choses de la vie
  14. le moindre vacances : il faudrait dire : les moindres vacances. Il veut dire que les Parisiens fuient Paris à la moindre occasion, dès qu’ils ont des jours de congé.
  15. les conneries : les bêtises, les inepties (très familier)
  16. ils nous remettent 3 ans dans la gueule : il parle de la réforme des retraites, très impopulaire, selon laquelle il va falloir travailler jusqu’à 64 ans au lieu de 62 pour avoir le droit de partir à la retraite. Il est en colère, d’où l’emploi de « gueule » (très familier) (= dans la figure).
  17. être en trois-huit = faire les trois-huit, c’est-à-dire avoir des horaires qui changent toutes les 3 semaines. On fait partie d’une équipe qui travaille une semaine en commençant tôt le matin, une semaine en commençant l’après-midi et une semaine en faisant les nuits, ce qui permet aux entreprises de fonctionner 24 heures sur 24.
  18. ça commence à peser : ça devient de plus en plus pénible
  19. nos entretiens : il veut dire que comme il est ouvrier, il doit faire lui-même l’entretien de sa maison, de sa voiture. Il n’a pas les moyens de payer quelqu’un pour faire tout ça.
  20. c’est un régal : c’est très agréable.
  21. remonter le moral : chasser le stress et redonner de l’énergie
  22. anodin : très ordinaire
  23. un GR : un sentier de grande randonnée, balisé, tracé.
  24. ça coupe les jambes : ça fatigue au point qu’on ne peut plus avancer
  25. dans mon optique : avec l’objectif que j’ai, selon la vision que j’ai de ce que je veux faire

Et pour découvrir tous les sentiers de grande randonnée (les GR) en France, c’est ici.

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