Perdus

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On peut se perdre dans la forêt !
(Petit billet inspiré par les commentaires d’Anne et Rick).

Une chose est sûre, c’est que si cela m’arrive (en compagnie de quelqu’un obligatoirement), je dirai spontanément: Je crois que là, on est perdus.
Dans l’incertitude du moment, jamais ne me viendra à l’esprit: Nous sommes perdus. Peut-être parce que je ne parle pas assez bien et qu’en disant « Nous », j’aurais vraiment l’impression de m’écouter parler. Et pourquoi surveillerais-je mon langage, perdue en pleine forêt et peut-être un peu contrariée, ou irritée ? Ou alors, ce serait précisément pour bien souligner le côté « dramatique » de la situation, ou pour ironiser, et je ne le dirais pas du tout sur le même ton que toutes mes autres phrases avec On:

Si tu veux mon avis, là, je pense que nous sommes perdus.

Tu crois pas qu’on est perdus ?
J’ai l’impression qu’on est perdus, là !
Tu es sûr qu’on n’est pas perdus ?

Pour écouter ces phrases: On est perdus

Donc oralement, On nous vient de plus en plus naturellement à la place de Nous, c’est un fait. Quand j’entends quelqu’un utiliser Nous, je le remarque immédiatement et je me dis en quelque sorte inconsciemment qu’il parle parfaitement parce que c’est comme ça dans son milieu ou parce qu’il surveille son langage. Ou alors, je me dis que c’est un étranger !
Encore quelques années et On employé à la place de nous ne nous semblera sans doute plus familier mais normal.

Et nous nous habituons voir le participe passé accordé au pluriel puisque même nos grammaires se sont adaptées et approuvent cet usage.

Pour le moment, je pense que je contourne le problème quand c’est possible: si je dois écrire, je continue à utiliser Nous, pour éviter d’avoir à faire cet accord qui paraît bizarre quand il est écrit noir sur blanc, imprimé, affiché comme dans cette publicité qui a attiré mon regard pour cette raison.
Mais je peux de moins en moins esquiver le problème puisque ce blog et son grand frère France Bienvenue sont nés de cette idée de transcrire des conversations dont je recherche avant tout le côté oral ! Alors, personnellement, je crois que je m’habitue à taper des S partout ! (Je vais d’ailleurs prêter davantage attention à ce que font les romanciers d’aujourd’hui.)

Pour finir, j’ai enregistré ce qui précède, mais pas exactement. Comme j’ai d’abord pensé cet article à l’écrit et pas comme un enregistrement, il y a de petites différences de style parce que je ne l’ai finalement pas lu à voix haute mais « reformulé » spontanément comme si je vous parlais. Alors, il y a des Bah, des Voilà, des négations imparfaites qui traînent !

Perdus Version orale

Et pour conclure vraiment, tout ça, c’était juste pour vous emmener vous perdre dans cette très belle forêt !

7 réflexions sur “Perdus

  1. Anne Jutras dit :

    J’adore! Pour ma part, je suis certaine que si je suis perdue en forêt avec une amie, ou un ami, je ne vais pas songer à dire « nous », je serais bien trop paniquée. héhéhé D’où la distinction entre l’oral et le littéraire.

    Merci pour ces explications, Anne, toujours un plaisir de te lire.

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  2. Svetlana dit :

    On est allées, on est fatiguées, on est revenues, on est contentes (avec mon amie). Anne, merci pour cette promenade curieuse dans une jolie forêt.

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  3. edelweiss dit :

    Bonjour Anne,

    Si je dis, en parlant avec quelqu’un de mes vacances en famille:

    Nous, on ne se perd jamais dans la fôret en France, c’est très bien balisé!

    Le mélange nous, on, cela sonne bizarre? Je parle très peu en français mais j’ai tendance à utiliser on parce que c’est plus facile pour moi conjuguer la 3ème personne du singulier. Mais avec l’accord ça se complique!

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  4. Anne dit :

    Bonjour Edelweiss,
    En parlant, c’est ce qu’on dit tout le temps. Et très souvent, on enchaîne très vite ce « Nous on », qui devient presque comme un seul mot à l’oral, preuve que c’est devenu très naturel.
    C’est intéressant, ce que tu dis sur le fait que c’est plus facile de conjuguer avec On. Sans doute parce que comme on utilise nécessairement tout le temps Il ou Elle en parlant des autres, on est beaucoup plus habitué à entendre cette 3è personne du singulier. Inconsciemment, il doit se passer la même chose dans la tête des francophones. Et c’est un cercle vicieux, car moins on entend Nous et le verbe accordé derrière, moins on l’utilise.
    A bientôt.

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  5. Rick Ellis dit :

    Bonjour Anne,

    Ce que tu décris dans ce billet est plus ou moins pareil « chez moi », c’est-à-dire l’usage de « On » ou de « Nous » auquel je me suis habitué au cours des échanges écrits ainsi qu’orales avec mes ami(e)s français(es). Ce qui fait pas mal de tels échanges, des centaines de mails, des centaines de conversations (par Skype ou face-à-face en France) depuis juin 2012, cela étant la date de mon premier voyage en France et le « coup de foudre » qui m’est arrivé, sur place, pour le pays, son histoire, sa culture, et la belle langue française. Bon, déjà je divague, revenons à nos moutons ! L’usage « auquel je me suis habitué » (de « On » ou « Nous »), c’est en général dépendant du suivant :

    1) Le contexte et plus particulièrement mon interlocuteur ou correspondant selon le cas (c’est un ami ? un amour ? quelqu’un que je tutoie, en tout cas, ou pas ?)
    2) Le milieu où se fait l’échange (le téléphone ? la forêt ? la boulangerie ? chez moi ? etc.)
    3) Le nombre de participants (si nous sommes dix, « On » va moins bien que si nous sommes deux).

    Si tout cela semble comme des « règles » que je suis, prudemment, avant de me servir de « On » ou de « Nous », c’est pas du tout le cas. Je n’y pense même pas, je « procède » plus intuitivement, plus inconsciemment, d’après ce que l’on m’a appris au cours de tous ces échanges dont je parlais plus haut. Ce ne sont pas donc des « règles », mais juste quelques observations « après le fait » de cet usage comme je l’ai appris.

    Deux constatations pour conclure :

    1) Si nous sommes deux, et nous sommes amis ou « plus proche que ça », c’est presque inconcevable d’utiliser « nous » comme sujet d’une phrase pour nous faire référence. Si nous sommes trois ou quatre, et nous sommes tous amis, alors c’est la même chose. Donc, soit à l’orale soit à l’écrit, si « Nous sommes perdus », ça s’exprime « On est perdu », et j’avoue qu’il ne m’est même jamais venu à l’esprit d’écrire « perdus » plutôt que « perdu ». Chacun de nous le sait déjà : « On » fait référence à nous tous les deux (ou tous les trois, ou tous les quatre etc.), donc pas besoin de transformer l’adjectif de singulier en pluriel. L’usage est très similaire à celui de Francis Cabrel dans sa chanson, et en fait sa parole est « Nous, sans la basse on est perdu », comme ça, pas de pluriel.

    2) Si nous sommes deux, et nous sommes amis ou « plus proche que ça », est-ce que nous dirions donc que « On est ami » ou « On est amant » en nous faire référence ? Bien sûr que non. Mais on ne sert pas automatiquement de « nous » non plus, loin de ça. On ne fais pas de « proclamations » comme « Nous sommes amis » ou « Nous sommes amants » (en y réfléchissant, « nous » me semble l’usage que l’un ou l’autre sort après une rupture, pour remarquer que « Nous étions amis » ou « Nous étions amants »). C’est plutôt que l’un dit à l’autre, « Je suis ton ami » ou « T’es mon ami », ou « Je suis amoureux(euse) de toi » ou d’autres belles phrases du genre « vraie vie » comme « Pourquoi tu me dis ça ? Mais bien sûr que si je t’aime ! »

    Oh là là, c’en était un looooooong… Il vaut mieux ne pas me poser des questions ! En tout cas, merci de me donner autant d’espace, et je te souhaite une très belle journée,

    Rick

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  6. Anne dit :

    Bonjour Rick,
    Merci pour toutes tes idées! Pas de problème, il y a beaucoup de place ici !
    – Tout à fait d’accord avec toi sur le fait que le meilleur moyen de « savoir » comment faire et le faire ensuite le plus naturellement possible, c’est d’écouter, lire, utiliser les mots le plus possible. Tu parles de centaines de mails, de centaines de conversations. Je comprends pourquoi tu parles si bien français ! 😉 C’est ce que j’essaie de faire toucher du doigt aux étudiants qui voudraient parler correctement une langue étrangère mais qui ne font rien de tout ça.
    – Je n’avais pas pensé au critère du nombre. Mais en fait, personnellement, je dis sans problème : On était 10 ce weekend. On est 10 dans mon groupe de travail. Et ça peut être plus: On sera 100 au mariage de… Je n’ai pas l’impression que le nombre change quelque chose. C’est davantage une question de niveau de langue pour moi. As-tu eu des expériences différentes ou des avis différents ? (Je sais, je ne devrais pas te poser de question! 🙂
    Bonne journée à toi
    Anne

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  7. Rick Ellis dit :

    Bonjour Anne et merci de tes propos très gentils sur mon français, je ne sais pas s’ils sont tout à fait mérités ! En ce qui concerne « On » et le nombre de personnes auquel le pronom fait référence, je ne voulais pas dire qu’il y en a forcément une « limite », je constatais plutôt quelque chose de très général de ma propre expérience. Pour être un peu plus spécifique, de mon expérience (et rien que de mon expérience), « On » implique quelque chose de plus familier et souvent de plus intime que « Nous ». Je peux quand même m’imaginer des situations où l’on pourrait se servir de « On » pour faire référence à un bon nombre de personnes, et on ferait cela précisément pour communiquer quelque chose de plus familier, de plus détendu. Par exemple, un guide dans un musée qui explique à son groupe de vingt personnes le contexte historique d’une peinture de Degas, et ensuite leur a demandé « Bon, on y va ? » juste avant de les mener à la suite du tour. Par contre, l’usage du genre qu’on voit dans la publicité de la banque (nous disant qu’ « On est forts ensemble ! »), c’est pour moi autre chose, et je ne peux pas y arriver. Bref, si on se sent obligé d’utiliser un adjectif pluriel d’une telle façon, dans une phrase ou le sujet est déjà « On », à mon avis ça ne communique que « nous » ne sommes pas vraiment « ensemble » après tout.

    Très bonne journée,
    Rick

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