Trop, c’est trop

Dans mon dernier billet il y a quelques jours, en écoutant parler Violette la navigatrice, vous avez entendu qu’elle partage avec nous ses émotions, celles qu’elle a ressenties pendant ses quelques trois mois seule en mer, puis celles qu’elle a éprouvées à son retour sur la terre ferme. Alors, avez-vous remarqué qu’un petit mot très ordinaire est revenu à plusieurs reprises dans son témoignage ?

Les retrouvailles avec les proches, c’était trop bien.
Mon équipe m’a organisé une grande soirée, c’était trop, trop chouette !
Vraiment, j’ai trop envie de verdure.
Ce qui est trop bizarre, c’est, du jour au lendemain, de voir des milliers de visages et des milliers de personnes.
Et maintenant, je suis trop heureuse. J’ai adoré ce Vendée Globe et j’ai trop envie de peut-être en repréparer un autre !

Si j’en fais le sujet d’un petit billet aujourd’hui, c’est que pour ceux qui apprennent le français, ce « trop » peut vous sembler un peu bizarre puisque habituellement, il indique un excès, il signifie que quelque chose dépasse la norme :
– Il y avait trop de monde, nous n’avons pas pu avoir des places pour ce concert.
– Quand les riches deviennent trop riches et les pauvres trop pauvres, le monde va vraiment mal.
– Elle n’aime pas les films trop tristes.

– C’était trop dangereux de skier dans cet endroit.

Mais comme Violette, nous sommes très nombreux à employer « trop » pour parler de quelque chose qui n’est pourtant jamais trop ! Il faut simplement se souvenir que c’est possible mais à l’oral, dans des conversations familières. Et dans ce cas, trop devient synonyme de très, de vraiment et sert à exprimer avec plus de force ce qu’on ressent :
– Merci pour ton cadeau, ça me fait trop plaisir !
– J’ai adoré ce film, il est trop drôle !
– Ouah, ta robe est trop belle !
– Ouah, trop bien ! Trop cool !
– Trop bonne idée !

– C’est trop gentil ! Trop sympa !
– J’ai trop envie de partir en vacances !

On retrouve également ce trop équivalent de vraiment dans des phrases négatives très courantes à l’oral :
– Je ne sais pas trop quoi faire pour l’aider. ( = Je ne sais pas très bien quoi faire / Je ne sais pas vraiment quoi faire)
– Je (ne) sais pas trop comment expliquer ça. C’est compliqué. J’ai pas les mots.
– Il a pas trop su quoi me répondre.
– J’ai pas trop compris pourquoi il s’est fâché.
– Non, on n’a pas trop envie d’y aller.

– Qu’est-ce qui s’est passé ?
Je sais pas trop. / On sait pas trop.

– Tu manges pas ?
Bah en fait, j’aime pas trop les huîtres.

C’est un style oral, c’est pour cette raison que j’ai enlevé « ne » de ces phrases négatives comme on fait souvent à l’oral.

Alors pourquoi ce trop ?
– Je dirais que dans la première série d’exemples, nous avons sans doute l’impression ainsi de donner plus de force à ce que nous ressentons. Cela va de pair avec le ton de notre voix.
– Dans les phrases négatives que j’ai citées, nous avons probablement le sentiment d’introduire un peu plus de subtilité, de nuance dans ce que nous évoquons. Je n’ai pas trop compris est sans doute moins frontal que Je n’ai pas compris.

Quant à notre expression Trop, c’est trop, voici de quoi l’illustrer dans cette bien triste, inquiétante et pitoyable actualité :




2 réflexions sur “Trop, c’est trop

  1. Anne dit :
    Avatar de Anne

    Merci beaucoup Salianne. J’étais passée à côté de ce documentaire. Quelle réussite ! C’est plein d’humanité et de subtilité. Un très beau témoignage de cette France dont on ne parle pas si souvent que ça. Et j’ai beaucoup aimé la façon dont c’est raconté, grâce au montage de tous ces moments. Un très beau travail documentaire. Je vais chercher comment donner envie de le regarder et préparer un billet là-dessus. D’ailleurs si tu as des idées de ce qui serait intéressant à ton avis, je suis preneuse, car il y a ce que je ressens mais il peut y avoir d’autres approches auxquelles je ne pense pas. Merci encore. Très bonne journée à toi.
    Anne

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