L’Institut National de l’Audiovisuel nous offre l’accès aux archives de l’audiovisuel public et c’est une immense richesse. Chaque jour, on découvre des extraits d’émissions, de reportages, de documentaires passés qui font écho à ce qui se passe dans le monde aujourd’hui. La plupart du temps, ces passages sont sous-titrés, ce qui est bien pratique quand on apprend le français. Ce qui est intéressant aussi, c’est d’entendre et se rappeler comment on parlait avant – il n’y a pas si longtemps de ça ! Nos façons de parler évoluent en fait très vite, imperceptiblement et on se retrouve quelques années plus tard à considérer comme presque bizarres et en tout cas très datés les termes utilisés, le phrasé, le timbre des voix.
Les sujets sont très variés. On redécouvre aussi des publicités qui ont fait date. Nostalgie… et étude sociologique !
J’ai choisi de vous emmener faire un petit tour en compagnie de Lucienne. C’était en 1972, elle n’était pas toute jeune. Mais ce dont elle parle est d’une surprenante fraÎcheur, avec cette diction et cette façon de rouler les R qu’ont encore aujourd’hui certaines personnes âgées dans nos campagnes.
Des explications
- le saindoux : de la graisse de porc
- avoir quelque chose sous la main : avoir quelque chose (ou parfois quelqu’un) qui est nous accessible immédiatement.
– Je n’ai pas mon téléphone sous la main. Tu pourrais les appeler, toi ?
– Pendant que je t’ai sous la main, tu veux bien m’aider à porter cette table ? Elle est un peu trop lourde pour moi. (familier) - la Sologne : région du centre de la France, entre la Loire et le Cher, très connue pour ses belles forêts et ses étangs
- Oh non, pensez-vous ! : Oh non, bien sûr !
Cette expression sert à nier ce que quelqu’un vient de dire. On peut l’utiliser aussi en tutoyant quelqu’un. Par exemple :
– Il va venir te voir bientôt ?
– Penses-tu ! On se voit juste une fois par an. ( = Bien sûr que non.) - soigner les bêtes : s’occuper des animaux
- rapporter quelque chose : rapporter de l’argent. Quand on dit d’une activité qu’elle ne rapporte pas grand-chose, cela signifie qu’elle ne permet pas de gagner beaucoup d’argent.
- j’en ai des légions : j’en ai énormément.
On peut employer ce nom dans des phrases comme celles-ci, souvent avec le verbe être. (Mais dans ce cas, légion reste au singulier) :
Les gens vraiment motivés pour faire ce travail ne sont pas légion, je te le dis !
Les fautes d’orthographe sont légion sur les réseaux sociaux. - au petit jour : très tôt le matin, quand le jour se lève à peine
- une volière : une grande cage à oiseaux
- si je puis dire : formule polie, dans un style plutôt soutenu, pour adoucir et nuancer ce qu’on vient de dire. Cette forme du verbe pouvoir s’emploie à la première personne du singulier. On la trouve aussi dans certaines questions : Puis-je vous demander un petit service ? C’est plus soutenu que : Est-ce que je peux vous demander un petit service ?
- Oh et comment ! : Bien sûr ! / Evidemment !
Cette expression indique qu’on est vraiment d’accord avec ce qui vient d’être dit. Par exemple :
– Tu comptes prendre des vacances bientôt ?
– Et comment !
Dans le sud-ouest de la France, on entend, avec la même signification : Pardi ! - j’ai pas l’air : on ne dirait pas.
« J’étais plutôt une révoltée. J’ai pas l’air, hein ! » = ça ne se voit pas immédiatement. On ajoute souvent « comme ça » juste après cette expression.
Par exemple : J’ai pas l’air, comme ça, mais je suis quelqu’un de très têtu. On peut l’employer pour parler des autres : Il a pas l’air, comme ça, mais dans le fond, c’est un grand émotif !
Il faut faire attention à la façon dont on place la voix et faire une très légère pause juste avant « comme ça » car cela signifie autre chose :
– Tu crois qu’il va être fâché si je ne viens pas ?
– Mais non, il n’est pas comme ça. Ne t’inquiète pas, il comprendra. - je répondais : répondre, c’est répliquer en s’opposant. Par exemple, un enfant qui répond à ses parents est un enfant qui n’accepte pas de leur obéir sans rien dire.
- on peut déborder un peu : s’écarter des chemins autorisés
- sans tambour ni trompettes : sans se faire remarquer, discrètement, sans attirer l’attention
- j’ai pas mal trimbalé : normalement, on dit : se trimbaler = se déplacer, voyager (familier, et un peu vieilli)
- les pays où qu’il y a pas de bois : rajouter « que » après où est bien sûr incorrect.
- je n’y resterai pas : dans les sous-titres, ils utilisent le conditionnel présent (resterais), alors qu’il faut le futur (resterai) à cause de ce qui précède : « J’espère qu’au paradis, il y aura des bois, parce que sans ça (= s’il n’y en a pas / s’il n’y a pas de bois), j’y resterai pas. »
On met le conditionnel dans des phrases comme celles-ci : S’il n’y avait pas de bois au paradis, je n’y resterais pas.
Pour faire la différence, cela peut aider de conjuguer à la 3è personne du singulier :
S’il n’y a pas de bois au paradis, Lucienne n’y restera pas. (futur)
S’il n’y avait pas de bois au paradis, Lucienne n’y resterait pas. (conditionnel présent)
J’ai enregistré certains des exemples ci-dessus, notamment quand l’intonation est importante :
Le site de l’INA est ici. (On prononce ce sigle comme un mot, pas lettre par lettre).
Personnellement, je suis abonnée à leur compte Instagram, ce qui est très pratique. Mais c’est juste une porte d’entrée pour le site complet qui vaut vraiment le détour !
Merci beaucoup, Anne. Je trouve cet article très intéressant. Ayant appris à parler français il y a longtemps maintenant, je suis consciente du fait que le langage parlé a beaucoup changé. Vos astuces de prononciation sont très utiles.
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Bonjour Salianne, merci beaucoup pour ce très gentil message. Et merci d’être fidèle à mon blog, malgré mon manque de régularité dans les publications. C’est toujours une très agréable surprise de voir que certains comme vous sont toujours là, depuis longtemps ! Maintenant que je vais avoir plus de temps, je vais essayer de partager à nouveau plus souvent ce que je trouve intéressant à propos du français (et de la France). Et si vous avez des idées ou des questions, n’hésitez pas. A bientôt!
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Quel bonheur l’amour de cette dame pour les oiseaux, j’espere qu’elle repose bercée par leurs chants.
Moi aussi je nourris les oiseaux, et ja laisse quelques pommes dans le pommier sans ramasser: en hiver les mésanges se régalent !
La façon de rouler les R que tu remarques c’est comme les Espagnols qui ont du mal avec la prononciation du R en français? Je m’embrouille toujours avec les R surtout au début du mot. :-‘(
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Oui, cet amour des oiseaux, c’est ce qui avait retenu mon attention en écoutant cette vieille dame. (Je ne sais pas quel âge elle pouvait avoir. Les gens faisaient plus vieux, il me semble dans ces années-là.) Et ce qui m’avait plus aussi chez elle, c’est cette personnalité pas tout à fait « dans le moule » pour une femme de cette époque, comme elle le laisse entendre.
A propos de la prononciation des R, il faudra que je demande à mon mari d’imiter ce que font certaines personnes âgées de la campagne, notamment dans le sud-ouest de la France : il fait ça très bien ! Moi, j’en suis incapable. Comme je suis incapable de prononcer les R espagnols ! Pourtant, j’aimerais apprendre ta langue mais je sais que vais buter sur les R partout.
C’est intéressant de lire ce que tu dis sur nos R en français : je n’avais pas imaginé que ça pouvait être un problème pour les Espagnols. (contrairement aux anglophones qui en majorité sont reconnaissables instantanément à leur prononciation de nos R.) En fait, ce n’est pas gênant pour celui qui écoute, je trouve. C’est plus embêtant à mon avis pour celui qui parle car ça gêne la fluidité de sa prononciation. On se sent moins à l’aise « physiquement » en quelque sorte.
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